Comme je l’ai écrit dans ma présentation, je suis née handicapée. Telle que j’ai été conçue je ne pouvais pas marcher avec une dysplasie bilatérale des hanches sevères. Si j’étais née ne serait-ce que dix ou quinze ans plus tôt, j’aurais passé ma vie dans un fauteuil roulant.
Fort heureusement je suis née en 1979, j’étais suivi par une jeune pédiatre assez réactive qui m’a rapidement orientée vers le service pédiatrique de la Timone sur Marseille. J’ai été prise en charge par une équipe chirurgicale avec un jeune chirurgien et j’ai même bénéficié d’une toute nouvelle technique opératoire venue des États-Unis.
Une fois « réparée », j’ai pu évidemment entamer une vie quasiment normale d’enfant de mon âge en ayant de la rééducation et suivi régulier à la Timone(jusqu’à mes 15ans). J’ai vécu une vie tout à fait « normale » jusqu’à mon burn-out. Le spectre du handicap avait été bien mis sous silence, sous le tapis.
Un an après mon burn-out, mon corps me faisait toujours de plus en plus souffrir, à ce moment là mon généraliste essayait de me soulager avec ses moyens. On ne parlait pas encore de spondylarthrite ankylosante et de passer des examens plus poussés. Un matin j’étais dans ma salle de bain en train de me préparer, non sans difficultés pour aller travailler, je me suis baissée pour ranger je ne sais plus quoi dans mon meuble de salle de bain. En me redressant j’ai senti dans ma hanche droite une douleur violente avec une sensation de déboîtement de ma tête fémorale. J’ai cru mourir ce jour là.
Je me suis retrouvée dans l’impossibilité de bouger même si j’ai pris mon courage à deux mains et j’ai réussi à aller jusqu’à la cuisine où j’ai pris un anti-inflammatoire . Enfin bref j’ai fini embarqué par les pompiers aux urgences en larmes, pétrie par la douleur, impossible pour moi de bouger. Je vous passe l’épisode des urgences et du retour à la maison parce qu’autant dire que si je n’étais pas aller aux urgences c’était pareil.
Je vous raconte cet épisode car à ce moment là, ça faisait plus d’un an que j’étais vraiment pas bien, lorsque j’ai eu cette sensation de déboîtement, une idée à traverser mon esprit « Céline tu as eu une trentaine d’années de sursis » sous entendu, que jusque là j’avais échappé au fauteuil roulant «mais là, cocotte tu vas y aller ! » Mais pourquoi donc, cette pensée est venue me traverser l’esprit. Est-ce une vision prémonitoire ? Mon fauteuil roulant, mon handicap était sorti de dessous le tapis !
Tout ça pour vous dire que je pense, mes parents pensant bien faire, en m’élevant comme mon grand frère, normalement , ont gommé un aspect de ce que je suis, parce que peut-être leur culpabilité de m’avoir partiellement ratée ou par peur de ce que la société allait dire, ils ont mis entre parenthèses mon début de vie difficile et pour tout le monde.
Finalement n’est-ce pas un problème d’image et de quant dira-t-on …? On vit dans une société très portée sur l’image, la perfection, l’infaillibilité, la performance. Les choses bougent dans le bon sens, au rythme d’une brise. Dans ce contexte le handicap a forcément une image négative, de faiblesse, où l’on vous renvoie souvent l’image d’inutilité, de fardeau pour la société…
Lorsque que j’ai eu ma reconnaissance de travailleur handicapé, pourtant nécessaire au bon déroulement pour la suite, ça n’a fait que renforcer mon idée de « fauteuil roulant ». Autant dire que je m’enfonçais toute seule. Mon image et mon estime en prenaient un coup. J’ai dû vraiment travailler sur ce nouveau statut même si au final ça a été une bouée.
Il y a un peu plus de 2 ans j’ai fait une formation en coaching professionnel ( je reviendrai dessus dans un autre publication). Lors d’un exercice de PNL (programmation neuro-linguistique), je ne sais plus exactement sur quoi on travaillait ( ma mémoire me fait toujours défaut) et je sais que j’en suis venue à parler du handicap… à la fin de cet exercice je me suis retrouvée avec une chimère qui me correspond : un pit-bull avec des ailes de papillon et une 5ème patte, une béquille.
Ce jour là avec le feed-back de la master-coach qui nous supervisait, je me suis rendue compte que mon handicap était un plus pour moi sur lequel je pouvais me poser, me stabiliser encore plus (5ème patte).
Finalement pourquoi le handicap serait un facteur moins…? Objectivement lorsque vous évoluez dans un monde qui n’est pas adapté à vous, vous êtes obligés de développer des compétences, des ressources, des connaissances afin de vous adapter et d’évoluer dans ce monde. Pour moi je comparais ça à une langue étrangère parlée, écrite. C’est comme une compétence en plus à ajouter à un CV
Aujourd’hui le fait d’être malade( handicapé) m’a permis de me concentrer sur moi, d’être résiliante, de lâcher prise, de développer encore plus mon empathie, ma bienveillance et de m’ouvrir encore plus aux autres.
Ma vision est peut-être difficile à comprendre voir peut passer comme absurde, inexacte mais si c’était simplement un travail à faire sur l’image, la représentation du handicap. Le société a encore du travail à faire sur ce regard. Je reste intimement persuadée que tout à chacun a sa place et sa raison d’être sur cette terre( peu importe le handicap, le parcours de vie, …) et que nous avons à apprendre des uns et des autres.
Et vous quel votre regard sur le handicap ou votre handicap ?
Je suis heureuse de connaître ton histoire Céline, tu as une maturité, un recul, une philosophie qui forcent le respect… on ne sent ni colère ni ressentiment… tu avances… cahin caha… et tu traces ton chemin… avec sagesse… je t’embrasse bien fort
Merci Magali 🥰
Merci pour ce beau témoignage Céline et cette belle force de résilience. Avancer toujours en s’acceptant tel que l’on est avec ses forces et ses faiblesses. Quel magnifique travail sur toi !
Merci Maïka, c’est pour ça qu’aujourd’hui j’écris pour transmettre ma positivé et dire que malgré un parcours difficile il y a toujours moyen de voir le verre à moitié plein et d’avancre. J’en parle dans ma présentation. 😘
Je ne connaissais absolument rien de ton histoire. Toujours à te voir, souriante, combative et fêtards. Tu fais bien de déposer une partie de ton bagage. Tu es une très belle et courageuse personne, spondygirl.
Spondycopine
Merci Raymonde, je sais aussi depuis quelques années tu partages le même combat avec force et courage. Je t’embrasse